Douleur

Lorsque l’on prononce le mot douleur, on pense très rapidement à une ou plusieurs choses. On repense à un évènement qui nous est arrivé, à quelqu’un, au deuil, à un accident, à une période de la vie… On peut même penser à une couleur, une image, un son… La douleur touche tous nos sens. Que ce soit physique ou psychologique ce mot nous évoque une sensation négative qui peut être simplement désagréable ou insupportable. Il est très intéressant de définir ce mot, de comprendre d’où il vient pour pouvoir l’apprivoiser.

D’après le dictionnaire de l’académie française, le mot douleur vient du onzième siècle., du latin dolor, ‑oris, qui signifie « douleur, souffrance physique ou morale ».

D’après le dictionnaire Gallica d’Antoine Furetière, la douleur est “un sentiment triste et fâcheux qui blesse quelque partie du corps et est ennemie de la nature : ce qui arrive par l’altération subite de la partie, ou par solution de continuité. Le péché de la femme a été puni par les douleurs de l’enfantement. Un stoïque dit qu’il n’y a point de douleur (voir l’article ataraxie qui définit la théorie des stoïciens). Douleur se dit aussi de toutes les passions de l’âme. L’affliction d’esprit égale les plus grandes douleurs. Il faut qu’un pénitent ait une vive douleur, une componction de ses fautes.  On dit en proverbe, pour un plaisir mille douleurs, pour dire qu’il y a bien plus de maux que de plaisirs en ce monde. On dit aussi, à la chandeleur la grande douleur, pour dire, la grande froidure.”

Selon la définition officielle de l’Association internationale pour l’étude de la douleur (IASP), “la douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite dans ces termes”.

D’après le CNRTL, il existe la “douleur dans le domaine de la vie physique (Souffrance plus ou moins vive, produite par une blessure, une brûlure, une lésion ou toute autre cause, qui manifeste une rupture du bien-être, de l’équilibre de la santé, la perte ou la diminution de l’intégrité physique), dans le domaine de la vie psychique (Souffrance de l’âme, produite par une déception, un deuil, un chagrin, une peine, qui compromet plus ou moins gravement la quiétude, le goût, le bonheur de vivre) et la souffrance affectant le corps et l’âme (Douleur affreuse, immense)”.

D’après le dictionnaire de l’académie française, la douleur peut être “une sensation physique anormale et pénible ressentie dans une partie du corps, provoquée par le mauvais fonctionnement d’un organe ou par une agression extérieure, un sentiment pénible, détruisant la quiétude de l’âme, provoqué par une peine morale, ou encore une souffrance affectant l’être tout entier (religion catholique)”.

Quelle que soit la source, on observe que la douleur peut être psychologique ou physique. Ces deux sensations sont à la fois très différentes et à la fois très similaires. On peut dire que comme le corps et l’esprit sont liés, quand l’un va mal, l’autre est forcément affecté. On parle également dans un contexte plus religieux, d’une douleur qui touche à la fois le corps et l’esprit. Je pense que comme corps et esprit sont liés, le spirituel peut en partie nous aider à apprivoiser, à gérer, voir à atténuer la sensation de la douleur.De plus, le mot douleur est universel, tout le monde peut le comprendre car c’est une sensation que tout le monde expérimente.

 

“La grande, la vraie douleur serait donc un mal assez meurtrier pour étreindre à la fois le passé, le présent et l’avenir, ne laisser aucune partie de la vie dans son intégrité, dénaturer à jamais la pensée, s’inscrire inaltérablement sur les lèvres et sur le front, briser ou détendre les ressorts du plaisir, en mettant dans l’âme un principe de dégoût pour toute chose de ce monde.”  (Honoré de Balzac, La Femme de trente ans, Paris, 1832)

Dans son livre, Balzac fait une étude des mœurs de la société. Il y parle d’amour, d’échec, de deuil et de mort. Dans sa citation, il évoque une douleur extrême qui anéantirai tout les autres moments de bonheur. Une douleur qui prend toute la place, qui empêche de vivre normalement et de voir la beauté du monde. Il parle de la douleur qui ne nous lâche jamais complètement, qui ne nous laisse aucun répit et qui nous torture lentement.

 

Les mots affliction et souffrance sont des synonymes de douleur. L’affliction est une “épreuve qui cause une profonde douleur” ou “une douleur profonde, généralement durable, accompagnée d’un abattement de l’esprit causé par un événement malheureux”. L’affliction est la douleur de l’esprit et non pas du corps. On pourrait la définir comme une sous-catégorie de la douleur.

La souffrance est “le fait de souffrir, d’éprouver une douleur physique ou morale ; état d’une personne qui souffre”. C’est un synonyme très proche du mot douleur. La différence pourrait s’expliquer par l’intensité du mot. La souffrance induit une douleur assez extrême. On parlera rarement de “petite souffrance”.

Les mots bonheur et jouissance sont des antonymes du mot douleur. Le bonheur est une “bonne fortune, chance favorable, occasion propice, événement propre à apporter quelque satisfaction“. La jouissance est un “état de bien-être, plaisir physique et moral“.

 

Il est impossible de ne jamais souffrir dans sa vie. Le mot douleur me fait penser à tout un tas de situations qui arrivent dans la vie. Il existe des douleurs universelles que tout le monde “subit”. Et certaine douleurs sont plus extrême (et heureusement plus rares) comme par exemple la douleur de la guerre, de la perte d’un enfant, de la torture…

En un sens la douleur nous accompagne tout au long de notre vie. C’est une forme d’instinct qui nous préserve de grands dangers, elle nous offre des leçons de vie, nous apprends… La douleur est cruelle mais peut parfois paraître douce (la douleur de la vengeance, la douleur physique qui apaise celle de l’esprit…). On pourrait encore citer des centaines de formes de douleur car elle est omniprésente dans le monde. Mais c’est également grâce à la douleur que l’on peut profiter des moments de bonheur, sans douleur il semble difficile de savoir ce que veut dire “ne pas avoir mal”. Car il est rare qu’une douleur dure toute une vie. Elles finissent souvent par s’estomper avec le temps.

Illustrer :

Sophie Ristelhueber, Every One # 14 1994  (épreuve gélatino-argentique noir et blanc montée sur plaque de fibre de bois, 270 x 180 cm, épreuve unique, Victoria & Albert Museum, Londres).

Sophie Ristelhueber photographie le corps lui même cicatrisé, recousu, comme si elle voulait rappeler que tout le monde pourrait un jour être concerné. La photo fait partie de  14 clichés d’une certaine  violence « esthétique » en noir et blanc réalisés dans un hôpital parisien. Les points de suture laissent ainsi deviner un paysage de la douleur dont la géographie serait le corps.

Manon Rouxel

 

 

Une réflexion sur « Douleur »

  1. J’aime beaucoup l’amorce, que je trouve percutante : elle donne envie de lire la suite.
    Mettre les citations des dictionnaires entre guillemets. A bien sélectionner, même si j’apprécie ce détail (5-6 définitions différentes : pertinent !). Bon réflexe, d’aller voir le Furetière. Il cite les Stoïciens : il serait intéressant, donc, de faire le lien avec l’article “ataraxie”.

    Attention aux homonymes “voir / voire”.

    J’aurais trouvé plus pertinent de citer un Soïcien, par rapport à la question de la douleur, pour faire le lien avec l’article du Furetière. Mais la citation est belle : à contextualiser et à expliquer. Préciser comment Balzac définit la douleur, quels mots il emploie, qu’est-ce que cela suppose…

    Je vous laisse finir l’article. Ne pas oublier de comparer les synonymes avec le mot dont vous vous occupez, en faisant un lien avec d’autres articles du blog-abécédaire si les mots y ont été étudiés.

    Bon travail 🙂

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