ÉLECTION

Introduction 

Loin des 87,33% de votants lors du 2nd tour de la présidentielle de 1974 opposant Valéry Giscard d’Estaing à François Mitterrand, 48 ans plus tard, la présidentielle 2022 ne comptait plus que 72% de votants, le plus bas taux de participation depuis la présidentielle de 1969.

À l’heure où la participation aux élections n’a jamais été aussi basse en France, ce terme au cœur de notre système politique revient comme un élément central lors de débats publics. En effet, les élections sont très présentes dans nos vies qu’elles soient exécutées dans le cadre associatif, politique ou encore personnel.

En quoi les élections, issues d’un besoin naturel, droits et devoirs français, mais aussi obligation dans d’autres pays reflètent notre société et garanti nos libertés ? Replongeons-nous dans l’histoire de ce mot afin d’en comprendre les sens et les enjeux.

 

Étymologie 


Le nom féminin « élection » viendrait du latin eligere dont le sens premier est cueillir puis est devenu choisir et plus particulièrement choisir celui ou celle qui nous semble le meilleur. Ce même verbe, employé sans complément, signifiait « faire le bon choix ».

Un rapprochement peu également être fait avec le terme religion qui posséderait la même racine latine.

Le mot « élection » est apparu dans la langue française au XIIe siècle.

 

Définition 


A) On dit aussi figurément, que Dieu a fait d’un pêcheur un vaisseau d’élection, pour dire qu’il en a fait un grand sain.
Dictionnaire universel, 1690, Antoine Furetière(définition religieuse)

B) Tribunal composé de plusieurs Officiers, comme Présidents, Élus, &c. pour juger les différends touchant les Tailles, les Aydes & les Gabelles.
Académie 2em édition, 1718 (définition historique)

C) Choix qu’opèrent des êtres vivants (humains ou non-humains) en vertu d’une affinité, d’une tendance instinctive.
CNRTL, TLFi (définition physiologique)

D) Procédure par laquelle des électeurs portent leurs suffrages sur les candidats qu’ils chargent de les représenter dans des assemblées administratives de ressort et de compétence variables.
CNRTL, TLFi (définition politique)


La définition A est une définition théologique qui supposerait qu’un dieu charge un particulier ou un groupe afin de le représenter dans des paroles et des actions et ainsi de les associer de façon étroite à son projet de salut pour l’humanité. De par son étymologie, il est fort probable que le sens théologique du mot aie été le premier.


Cependant, une élection n’a pas toujours été employée pour désigner un choix quel qu’il soit. La définition B nous apprend que le terme élection a été utilisé pour nommer une institution juridique à plusieurs acteurs dont certains élus. Cette institution jugeait les désaccords concernant les droits pris par le roi sur les marchandises, les personnes et la vente du sel.


La définition C explique l’élection comme un choix inconscient, naturel qui n’est pas le propre uniquement de l’être humain ; les animaux et autres être vivants en sont également capable. Ce peut être le cas lors du choix d’un partenaire pour les animaux procédant à une reproduction sexuée ou encore l’orientation des feuilles d’un végétal chlorophyllien cherchant la lumière. Ce choix s’opère toujours pour un meilleur fonctionnement de ce dernier ou de son espèce.


La définition D relève du domaine politique. En effet, elle réfère à l’acte de désigner par le vote un représentant. Cette action est par exemple utilisée dans les démocraties indirectes et semi-directs comme la France. Cette définition ne s’oppose pas à la précédente. Bien au contraire elle l’appui en illustrant un choix de gouvernement fait par les hommes pour un meilleur fonctionnement de la société et une meilleure représentativité de l’individu.
De manière générale, une élection est toujours effectuée dans le but d’améliorer ou de pérenniser l’humain, les conditions de vie humaine.

Citation 

« L’élection encourage le charlatanisme » Ernest Renan, la réforme intellectuelle et morale de la France. (1871)

Ernest Renan, né en 1823 à Treguier et mort en 1892 à Paris est un

Ernest Renan dans les années 1870, photographie d’Adam-Salomon.

intellectuel français du XIXe siècle. Il est écrivain, philologue, philosophe, épigraphiste et historien français.
Il écrit au printemps 1871 la réforme intellectuelle et morale de la France. Ce livre a été conçu sous le choc de trois événements qui ont été vécus comme une catastrophe par l’auteur : la guerre franco-allemande soldée par l’amputation d’une partie de la France ; la chute de l’Empire et la Commune de Paris.
Dans son livre, Renan fait l’état d’une France meurtrie et y partage son opinion politique. En effet, l’auteur est septique devant la République française car impossible ne cessant d’échouer ; selon lui, l’État ne peut être que royaliste. Il est également contre la démocratie et méprise les classes ouvrières et paysannes, car toujours selon lui, le peuple est inéduqué et inéducable ; rien de bon ne peut ressortir de cette masse.


Dans sa citation, Renan exprime clairement son scepticisme à l’encontre de la république, car en effet, l’élection est très souvent associée à ce système politique qui consiste en l’élection d’un chef de l’état par des représentants du peuple, eux même élu. En effet, cette citation peut être vue comme une critique de la république.
Cela peut-être une critique portant sur le processus électoral effectivement ce dernier peut être perçu comme une illusion de pouvoir par le peuple. Le charlatanisme étant l’art d’exploiter la crédibilité d’autrui érigé en système. De telles manières que le peuple de part diverses élections à l’impression d’avoir un quelconque pouvoir politique, or ça ne semble pas être le cas d’après Renan.
On peut également y voir une dénonciation des politiciens montés au pouvoir grâce aux élections ; ces dernières pourraient favoriser le gouvernement par des candidats aux promesses frauduleuses et irréalisables.
Une méfiance envers les élus pourrait aussi être abordée. Assurément, certains profiteraient du système d’élection pour arriver au pouvoir à des fins purement personnelles. Ce processus serait rendu possible par une non-transparence, non-intégrité de la structure politique et ainsi créer un scepticisme généralisé envers les institutions.
Une mise en garde contre la manipulation politique est envisageable dans l’étude de cette citation. Lors des élections, les candidats ont la possibilité d’utiliser le contexte électoral comme moyen de propagande et de manipulation. Ils pourraient à l’aide de discours populiste et de méthodes de communication spécifiques influencer l’opinion publique.
Ainsi, la faute serait également aux électeurs qui n’ont pas su faire preuve de discernement, la capacité de ces derniers à prendre des décisions éclairées est remise en question.

La démocratie ne serait qu’illusion. Le peuple, en élisant plusieurs représentants est persuadé de ne craindre aucune menace tyrannique. Or, comme le pense Tocqueville : la démocratie est le despotisme de la majorité. En effet, pourquoi certains élus ne se rassembleraient en majorité et ne prendraient pas le pouvoir au même titre qu’un unique individu au pouvoir ? La démocratie comme tout système politique serait gouvernée non pas par les intérêts d’un individu, mais bien ceux d’une majorité tout aussi dangereuse.

Cette citations prêtant à controverse semblerai être un appel à la réforme politique. En effet le rassemblement de deux termes à première vue opposé : l’élection, l’assemblement de plusieurs opinions dans un objectif d’une plus grande représentativité, force et intelligence collective pour une parfaite transparence politique et une meilleure gestion de la vie publique encouragerai le charlatanisme, l’abus de la crédulité publique. Cette révoltante liaison dénonce les abus et les dérivées liés aux élections et ne peut qu’encourager la réforme de ce système.

Ainsi, cette citation invite à réfléchir sur les défauts et les limites du processus électoral, ainsi que sur les risques de manipulation et de corruption qui peuvent en découler. Elle soulève des questions importantes sur la république, la représentation politique et l’intégrité des institutions.

 

Synonymes et antonymes 

 

SYNONYMES 

• Vote : Opinion exprimée, suffrage donné dans un corps politique, dans une assemblée délibérante, dans un collège électoral, dans une compagnie. Académie 8em édition

• Choix :Action de choisir, décision par laquelle on donne la préférence à qqch. Le Robert

Le vote désigne une élection purement politique exprimée par suffrage, or le terme élection ne désigne pas uniquement un système d’expression dans les affaires publiques. Cependant, le mot étudié tend de plus en plus à s’employer exclusivement pour parler d’un fonctionnement politique.

Le choix, sens premier d’élection semble être un synonyme au sens très proche, voire identique. En effet, jusqu’au XVIIe siècle, le mot « élection » signifiait seulement « choix », sans notion de vote. Cependant le terme élection employé dans son sens exclusif et originel de choix à presque disparu du français contemporain pour y intégrer la notion de vote. Seul quelques expressions juridiques conserve le sens d’élection comme un choix.

Ainsi, aujourd’hui, une élection est un choix effectué par vote.


ANTONYMES 

• Imposer : Action de commander, d’infliger. Académie 9em édition
• Abstention : Action de s’abstenir de l’exercice d’un droit, d’une fonction, d’un usage ; résultat de cette action. Académie 9em édition

 

Interprétation 


Le terme élection témoigne d’une grande force et insinue une grande responsabilité. C’est un important héritage politique nous venant tout droit de la Grèce antique en passant par la révolution française. Il s’est modifié au cours du temps ; s’adaptant aux sociétés et au contexte historique. À l’antiquité par exemple, le droit de vote était réservé aux hommes d’une certaine classe sociale et d’un certain âge. Puis au XIXe et XXe siècle, les mouvements pour les suffrages universels ont pris en importance. Cependant, la progression ne s’arrête pas, une recherche de l’égalité électorale est toujours en cours. Les différentes régions du monde ont progressé à des rythmes différents dans l’extension du droit de vote aux femmes et à d’autres groupes marginalisés. Les Guerres mondiales ont joué un rôle important dans l’extension du suffrage féminin, car de nombreuses femmes ont contribué à l’effort de guerre et ont revendiqué le droit de vote en reconnaissance de leurs sacrifices. Parfois oublié, le droit de vote ne cesse de revenir sur le devant de la scène à chaque révolution sociale.


En effet, l’élection, c’est l’expression de la volonté populaire. Ce processus reflète les préférences, les opinions et les intérêts de la population dans la sélection de dirigeants et politiques.


Les élections sont très présentes dans les systèmes de démocraties représentatives comme la France. Les citoyens élisent des représentants qui votent et mettent en place des lois. Ce système à l’avantage d’être plus efficace, plus stable et plus facile à mettre en place qu’une démocratie directe. Cependant, ce transfert de responsabilités peut poser quelques problèmes développés à suivre.


Les élections comme moyen d’expression et d’existence pour les électeurs. Le droit de vote donne de l’importance politique au peuple et chaque personne est libre de s’exprimer. Chacun des avis est pris en compte et vaut autant qu’un autre. Ainsi, une élection libre et équitable assure une grande représentativité des électeurs et de leurs divers intérêts et opinions au sein des institutions politiques de la sorte à légitimer le gouvernement. Cependant, tout cela ne peut se vérifier uniquement si tous les habitants d’un territoire ont le droit de vote, les minorités comprises.


Pourtant, cette demande d’expression individuelle peut nuire au processus de vote. La force des élections est le collectif et l’assemblement de chaque individu, mais c’est aussi sa plus grande faiblesse, car un individu peut être irrationnel, manquer d’informations, voter par conformité sociale ou encore se désintéresser du vote à cause d’un sentiment d’impuissance.


D’autre part, le processus d’élection permet également une responsabilisation des élus. Ils sont tenus de rendre des comptes à leurs électeurs pour leurs actions et leurs décisions une fois au pouvoir, sous peine d’être sanctionnés lors des prochaines élections.
La concurrence entre les candidats ou les partis politiques afin de gagner la sympathie des votants met l’accent sur les stratégies de campagne, les discours politiques et les tactiques pour convaincre les électeurs. Cela permet des avancées sociologiques intéressantes comme plus dangereuses si appliquées pour l’intérêt individuel ou d’une minorité comme la propagande ou diverses techniques de manipulations menant souvent à des régimes totalitaires.


En effet, les élections peuvent être un danger pour la démocratie. Elles peuvent être vues comme un symbole de démocratie, de liberté et de participation et représentation citoyenne. Cependant, elles sont aussi très fragiles, car rien ne garantit que tous les candidats se présentent dans l’intérêt du peuple, et l’individu est grandement influençable et peut parfois sous le coup de fort mécontentement faire des choix de votes entraînant la chute du système.

ILLUSTRATION

 

Des femmes au premier tour des élections municipales, le 13 mai 1945 à Paris.

Sur cette photographie, on peut observer des femmes dans un bureau de vote ; certaines comptabilisent les votes, et d’autres se préparent à voter. Au premier plan à gauche, une femme prête à voter, suivie d’une deuxième. À droite, trois femmes travaillent à la table de décharge. À l’arrière-plan, trois observent passivement. De par leur majorité numérique et leur activisme sur cette photographie, les femmes semblent pleinement actrices de ces élections. Cela contraste avec le retrait des hommes, il est peu habituel à cette époque de voir la femme mise en lumière pour un engagement politique. Sans contexte, on pourrait presque croire que les femmes prennent le pouvoir et excluent les hommes, ce qui est pourtant encore très loin d’être le cas. Cette photographie à été prise au premier tour des élections municipales de Paris le 13 mai 1945. Effectivement, c’est le 21 avril 1944 que le droit de vote a été délibéré aux femmes en France. C’est donc lors des élections municipales de Paris que les femmes votent pour la première fois. Elles votent en grand nombre et de manière plus modérée que les hommes ; les deux principaux arguments contre le droit de vote des femmes ont été balayés en une élection.

J’ai choisi cette illustration, car elle rappelle que les élections ne sont pas accessibles à tous. En effet, elles ne sont possibles qu’en démocratie ou en république. En France, il faut être majeur, de nationalité française, jouir de ses droits civils et politiques et être inscrit sur liste électorale. Cependant, cela n’est pas le cas dans tous les pays certains pays comme l’Inde ont interdit le droit de vote à certaines minorités comme les musulmans, même si ils sont détenteurs de la nationalité indienne. En effet, le refus du droit de vote a toujours été un moyen d’oppression. Ce refus est souvent lié à des arguments fondés sur des stéréotypes et préjugés portants sur la supériorité supposés de certaines ethnies, genre, classes sociales, nationalité ou origine. Les réglementations très fortes du droit de vote permettent à une part de la population de garder une supériorité et des avantages souvent problématiques. Cela restreint grandement les libertés et l’expression de la part restante.


Par exemple, les femmes ne pouvaient pas voter et ne peuvent toujours pas voter dans certains pays comme l’Arabie Saoudite, car elles seraient intellectuellement incapables de prendre une décision politique éclairée et rationnelle, car elles seraient considérées comme trop émotionnelles donc non-responsables. Il était également partagé que la femme était déjà représentée par l’intermédiaire de son mari, père ou fils, car ce dernier devait voter dans l’intérêt de son foyer. De plus, dans cette société largement patriarcale, les hommes devaient exercer le pouvoir et les femmes se conformer et se soumettre. Leur place était au foyer et leur participation à la vie politique aurait affaibli les bases de la société. En effet, exposer la femme à un environnement considéré comme corrompu, violent et hostile risquerai de compromettre la féminité et la moralité des femmes.


La participation aux élections est donc indispensable pour faire valoir ses droits ; c’est une assurance d’égalité, de représentativité, de diversité et de légitimité de l’élu.

Apolline BROUSSE

Une réflexion sur « ÉLECTION »

  1. Vous décidez de problématiser dès le début, ce qui est un très bon réflexe. Mais prenez le temps de trouver une amorce plus percutante (pensez à une image, une anecdote, pour éviter de rester dans le flou des généralités) : vous vous entraînez ainsi au Grand Oral (EOT), à la “captatio benevolentiae”.

    Une relecture grammaticale s’impose aussi. Revoir notamment le cours de français sur la distinction entre les virgules et les points virgules.

    Les deux étymologies sont liées : le bas latin ecclésiastique vient du latin classique. Je vous conseille de remettre l’histoire du mot dans l’ordre chronologique ; d’ailleurs, “eligere” suffit largement (sens 2 du dictionnaire de latin). Il est composé de “e-” + “lego”, ce qui en fait un mot de la même famille que “religion”. Je pose cette idée ici, faites-en ce que vous voulez 😉

    Pour les différentes définitions, le but du jeu est de comparer des dictionnaires différents. Mettez-les par ordre chronologique. Pensez au Furetière, du XVIIè : dans une société où tout est pensé en acte religieux, l’élection est forcément une notion de théologie (élection divine). A vérifier…

    Citation très bien choisie : excellent exemple de paradoxe ! Les deux premiers paragraphes sont en revanche inutiles. Synthétisez-les au cours de votre explication, si besoin. Mais l’intérêt est d’expliquer une phrase, comme pour la question 2 de l’examen.
    Votre explication doit être clarifiée. Partez des mots de la citation, que vous définissez. Parlez d’un paradoxe, ce qui suppose d’étudier la doxa. Pour vous aider, voir avec Antoine et Auxence : Renan a lu Tocqueville, dont la critique centrale de la démocratie est qu’elle constitue “le despotisme de la majorité”.

    Impeccable, pour les synonymes et antonymes : c’est bien compris et très clair. Peut-être un lien interactif vers la fiche “choix” ? Il me semble l’avoir vue…

    L’argumentaire est intéressant, mais il est à réorganiser. On doit percevoir plus de logique dans le raisonnement. N’oubliez pas de parler d’Etat démocratique ! L’élection suppose la démocratie représentative.
    Evitez d’employer le verbe “évoluer”, trop imprécis. Que voulez-vous d’ailleurs dire quand vous parlez d’élections qui ont su s’adapter ? S’adapter à quoi ? Aux moeurs ? On aurait besoin aussi de faits, ou de renvois à des lois… Vous pouvez gagner en précision, ce qui vous fera gagner en conviction (y penser aussi pour l’EOT).

    Pertinent choix de photo, mais de qui est-elle ? Commencez aussi par la décrire, avant de l’interpréter. Il y a clairement une mise en scène des élections ici ! Rappelez quels étaient les arguments contre le droit de vote des femmes auxquels vous faites allusion. Attention au premier paragraphe : il manque des mots et il y a des erreurs de vocabulaire comme d’orthographe. Vous avez cependant raison de passer par le contexte historique, essentiel pour saisir le sens de cette photographie.

    Bon travail 🙂

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